Proposition n°5 - la contrainte du prisonnier

Voici une incitation à l'écriture directement issus des contraintes de l'OULIPO (ce mouvement littéraire émergeant dans les années 60, 70, sous l'impulsion d'écrivains tels que Raymond Queneau, Georges Pérec…et qui a vécu des belles heures à l'antenne dans l'émission "des papous dans la tête" sur France Culture).
Cette contrainte m'a paru adaptée au contexte de confinement :
Contrainte du prisonnier
Un prisonnier veut envoyer un message mais ne dispose que d’un papier minuscule. Pour gagner de la place, il formule son message en évitant toutes les lettres à jambages.
Ne restent que a, c, e, m, n, o, r, s, u, v, w, x, z.
Si le prisonnier dispose d’un peu plus de papier, il pourra se permettre d’utiliser le i.
Ex : un incarcéré économe : « nous, communs amis, écrivons sans ennui une missive »
- le prisonnier libéré se sert des voyelles, du y et des seules consonnes qui lui étaient précédemment interdites.
b, d, f, g, h, j, k, l, p, q, t,

Amis qu'amusent les contraintes, qui s'en jouent pour retrouver liberté, à vos plumes!
ou Amis : osez, écrivez!

Non! Madame, même enfermée dans la Tour*, même seule à composer, je préfère adopter une palette de lettres sans ce (i) que vous proposez d'ajouter......éventuellement!
Ah ! Quelle déloyauté ! Vous mettez l'eau à la bouche de vos rédacteurs asséchés, les compromettant avec ce freluquet.
Sachez, Madame, que les vamxcerwunsz ne me gênent aucunement, encore que confusément plaçables ; par contre ce glyphe........de grâce, ne me le soumettez pas !
Dans votre offre, remarquez sa prévalence, vous taxant, par 3 passages, de plus de douze pour cent de votre espace. De plus, cette barre dressée sous une bavure écorche, sans se gêner, mes esgourdes, lasses de ses larmoyants unnnnnnnn * et yéééééééé*. Ma détresse sera au comble, découvrant la clameur (non je n'offense pas mon texte en la notant) – appelons-la : dont on ne profère pas le nom - clameur dont on ne profère pas le nom perçant une bulle de ma BD préférée. Comment raconter à présent ma rage sans employer le lot d'arrangements du futur ?
Rabattre son caquet à cet avorton de javelot pétant plus haut que son cul m'exalte.
Son nabot de rocher flottant sur la page menace en permanence d'écraser la folle mouche, la guêpe ou le bourdon cherchant quelque repos au sommet de sa tête. Alors que ce rond suspendu prétend remettre les pendules à l'heure, son absence plonge la tache dans le néant, semant le trouble dans le texte.
A supposer que j'agrémente la marque en y collant deux ronds pour autant je ne soulage pas mes jugements. En effet quand le tréma voyage, le - dont on ne profère pas le nom - reste planté là, cloué au sol. Une preuve de plus de sa maladresse : le chant du coq se détraque en un haut perché éclat acéré peu supportable sous le règne de ce coup de crayon de passage en Espagne.
Les abus de ce caractère crâne n'ont d'égal que son arrogance, ponctuant le nom de chaque jour, et mensuellement le même affront. Fort heureusement l'automne débarque et nous en débarrasse jusqu'au bout de l'année.
Pas de glose non plus au sujet de sa honteuse absence dans la tablature AZERTY. Observez ! Constatez là encore son manque conséquent, opposé à l'avantage de son frère, le grec, remarquable double voyelle déroulant sa grâce toute bouclée, élégante passerelle entre les douces sœurs. Ce – dont on ne profère pas le nom – tranche, s'absorbe ou se répand chez l'autre, telle la gale sur le bas clergé. Le tracé conquérant transforme les A, E, O, U en è, é ou encore le WOUA qu’exagèrent les farauds. Sa forme majeure nous confond, joue sur nos nerfs dans les codes et les mots de passe. Est-ce un I, un L, un - dont on ne profère pas le nom - majuscule ?
Trouvant tant de défauts à ce grêle tracé, ma préférence va aux lettres rondes et dodues, queue en bas, queue en haut, elles courent sans menace dans une danse heureuse.
Et elles font le bonheur d'une aventureuse lipographe.

* Tour de Ténéro sans aucun doute
* contrAINt
* prisonnIER

Cet émoticône clignote comme l'éclat de phare sur celui dont on ne profère par le nom, et souligne par là-même mon ébahissement: quel talent! Merci Aimetleau!

Merci Admin ! Je pense que les conseils des uns et des autres apporteraient un peu de douceur à ce texte que je trouve un peu heu...mécanique. Mais ce sentiment est sans doute dû au fait que j'ai "travaillé" ce texte comme un exercice. Bref, je suis preneuse de remarques et de conseils....